Photos

 Ce sont là quelques photos du tournage de mon film qui s’est déroulé en deux temps.
Le premier, pendant dix jours, dans l’appartement de ma mère, en
banlieue nord. Des instants de vie quotidienne avec de magnifiques
moments de rire et des instants de solitude aussi.
Celle qu’on rencontre dans toutes les histoires d’exilé-e-s. Si elle s’atténue
avec le temps, elle ne disparaît jamais vraiment. Bien des entretiens
réalisés à cette occasion en sont le reflet.
Des paroles difficiles à dire et, comme je le pressentais, souvent difficiles à
entendre.
Mais bon ! Nous avons là de précieuses paroles sur cette histoire de
l’immigration qui, décidément, n’en finit pas de s’écrire.
Et puis, trois semaines de tournage dans mon village, niché dans le Massif
du Djurdjura, en Algérie. C’était en juin, à cheval sur juillet. Un tournage
difficile, éprouvant.
Mais là encore, des moments d’émotion intense. Emotion quand
l’émigration/immigration est dite par ceux qui sont restés. Ma tante a
regardé partir ma mère. Elle n’a rien oublié de cet instant qui reste tragique, encore aujourd’hui.
Moments de magie. Aussi. Quand les ancêtres, érigés en Kabylie au rang
de saint sont évoqués. Invoqués.
Ma mère m’explique, là, que chaque matin depuis toujours, en France
comme en Algérie, elle salue l’ancêtre. 
C’est à Lui qu’elle adresse ses
premières pensées. Ses premiers vers. Ses premières prières.
J’apprends aussi, et encore, que ma mère, avant et pendant son exil
composait des poèmes oralement puisqu’elle n’a jamais appris ni à lire nià écrire. Poèmes tus. Parfois oubliés à force de les enfouir dans le silence
de l’exil. Il n’y a pas pire ennemi quand on vient de l’oralité car ce qui n’est pas dit finit par mourir...